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Extraits de

Collision (dessins de Jacky Essirard), éd. Atelier de Villmorges, 2003

Tronc 5

 

La vie acculée derrière un dernier arbre. En tant que telle, il faut l’appréhender comme ça, renversée comme une rétine : debout, ma tête suspendue par un fil invisible à la terre, je vois le ciel en bas, la pluie monte, et cela pendant une courte durée donne une bonne leçon à ce qui pourrait fonder une objectivité. Seulement, la température froide même si le témoin lumineux indique le chiffre et le degré à l’envers.

 

: une main chaude se pose sur mon épaule dans une douceur amicale et ça

 

            risque de chambouler tout net la direction haut-bas. Je sursaute puis me redresse, et durant la brève vibration d’un ressort qui monte et descend ou descend et monte, la fragilité d’un paysage ordinaire

 

devient palpable.

 

La pluie, le signe fluorescent, le branchage, tout ou quoi, tout bouge dans un mouvement vertigineux.

 

L’acidité remonte, les voix des manifestants qui brancardent photos, slogans et couleurs s’estompent alors qu’elles cherchaient un chemin sous ma nuque vers ce globe détraqué -et je désigne ma tête.

 

 

Une voix féminine, trois fois répète une même prosodie de syllabes. Sans chercher à donner une figure ou une taille à la main posée sur mon épaule, je relâche un oui en guise de pas vraiment envie de suivre une quelconque logique. Les yeux fermés. Les choses tellement enchevêtrées en moi qu’aucune incitation à dénouer ou renouer avec le dehors n’est souhaitable.

 

Maintenant, a posteriori,

 

cette

 

collision de sens contre sens

a extrait

 

une couche

d’essence sur ce.

 

(La pluie, le signe fluorescent, le bruissement plus ou moins perceptible, l’intensité du branchage, ténébreuse avec quoi il faut

 

pas jouer le malin un soir d’hiver, la poubelle de l’immeuble, le brouhaha, les notions-meurtrières, les mécanismes, l’inévitable, Ma tasse de thé, le méta et le ver de terre tombé sur le pouce alors que je suis entrain de lire

 

le Livre) 

 

Bref, l’expérience intégrale 

vieillie instant après instant. Inabordable,

 

 

si inabordable soit-elle, la combinaison se présente déchirement ou

 

étirement

de bric-à-brac

impertinent -dedans moi.

 

             

En face, des bâtiments

à

 

la teinte sombre

 

et l’architecture répétitive, totalitaire sur plus d’un km périphérique où glandent enfants et adolescents et où peu d’amis osent se rendre,

 

contrastent

 

avec la masse colorée d’arbres. Allégorique. Mais tellement présente qu’elle devient

 

un air

 

connu. 

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